Les différents modes de rémunération des médecins libéraux

Au regard de l’article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale de 2008, qui prévoit l’expérimentation de nouveaux modes de rémunération des médecins pour une durée de 5 ans, il convient de s’interroger et de comparer les différents modes de paiement utilisés en France (1) et à l’étranger (2).

Le paiement à l’acte

Le principal mode de rémunération des médecins libéraux est le paiement à l’acte. La rémunération est directement liée à l’activité et au volume de soins que le médecin délivre au cours de chaque consultation.

Soulignons que ce mode de paiement peut engendrer une augmentation des dépenses de santé. En effet, par ce dispositif, le professionnel de santé peut accroître sa rémunération en augmentant le volume d’actes effectués ou en augmentant le temps de travail ou bien encore en raccourcissant la durée accordée à chaque consultation. Le mode de rémunération à l’acte  est une illustration du débat opposant éthique et spéculation.

Christian Prieur[1] a d’ailleurs précisé à ce sujet que « l’assurance maladie, en finançant les biens et les services médicaux, assurent aux professionnel de santé leur revenus : ceux ci ont donc tout intérêt à les augmenter en créant des dépenses qui seront de toute façon remboursées aux assurés. La demande induite conduit en effet à une surproduction de soins. (…) C’est ainsi que le principe de l’exercice libéral de la médecine- liberté d’installation du médecin, libre de choix du médecin par le malade, liberté de prescription du médecin, paiement direct des honoraires par le malade – n’est pas compatible avec un financement socialisé si celui-ci est considéré comme sans limites ».

Si le paiement à l’acte constitue le mode de paiement le plus utilisé en France concernant les professionnels libéraux, le paiement par capitation est un mode de paiement utilisé à l’étranger qu’il est intéressant d’envisager (2).

Le paiement par capitation

La capitation est un mode de rémunération non appliqué en France, mais qui existe toutefois dans d’autres systèmes de santé. La capitation est une rémunération forfaitaire correspondant au nombre de patient inscrit au cabinet du médecin, il est indépendant du volume d’acte pratiqué au patient. Le médecin perçoit donc une somme forfaitaire par patient inscrit à son cabinet, indépendamment du volume de soin qu’il prodigue. La rémunération du médecin va donc dépendre des caractéristiques de chaque patient, tel que l’âge et le sexe.

La capitation est un mode de rémunération très présent dans les systèmes de protection sociale centralisés qui reposent sur le principe de l’universalité et de la gratuité des soins financés par l’impôt tels que le Royaume-Uni, l’Italie, l’Espagne, la Suède, la Norvège, le Danemark, la Finlande, l’Irlande et partiellement le Portugal, la Grèce, le Canada, l’Australie, et les Nouvelle-Zélande. La capitation est souvent associée à un système de paiement à l’acte ou de salariat.

L’intérêt majeur de la capitation est qu’elle n’incite pas le médecin à prescrire trop de soins, puisque le montant de sa rémunération est forfaitaire, et donc prévisible.

Inconvénient de la Capitation

En revanche, l’inconvénient principal de la capitation, est qu’elle peut engendrer un phénomène dit « d’écrémage », ou de sélection des patients. Il est en effet plus avantageux pour le médecin d’avoir une patientèle en bonne santé, car ce dernier n’est pas remboursé selon les actes qu’il effectue. En définitive, les consultations vont devenir une source de dépense, au lieu d’être une source de revenu pour les médecins.

Le deuxième effet pervers de la capitation, est le phénomène de « délestage », qui consiste à renvoyer les patients vers un spécialiste, afin de ne pas effectuer de soins onéreux, et  ainsi augmenter sa rémunération. Les médecins généralistes auront donc pour mission de réorienter les patients vers un spécialiste, ce qui peut entraîner un phénomène de « gatekeeping » impliquant des listes d’attente très longue chez les spécialistes.

Après avoir envisagé les différents modes de paiement des professionnels libéraux, il convient de nous intéresser au versement de la rémunération des médecins salariés.

[1] Christian Prieur a été directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie pendant douze ans. Il a présidé l’Andem (Association nationale pour le développement de l’évaluation médicale), préfiguration de l’Anaes.

Modes rémunération des médecins libéraux