I- La cartographie des métiers

2. La Démarche GPEC mise en œuvre par l’établissement de santé nécessite l’utilisation d’un certain nombre d’outils stratégiques, tels que le répertoire des métiers. En effet, dans le secteur sanitaire, le « répertoire des métiers de la fonction publique hospitalière », représente l’outil stratégique central de toute démarche GPEC.

3. Initialement plébiscité par l’Observatoire National des Emplois et des Métiers de la Fonction Publique Hospitalière (ONEMFPH), une première version du répertoire a d’abord été publiée en 2004 par la DHOS, avant qu’une deuxième version ne voie le jour en 2008 sous forme numérique. La mise en œuvre de ce répertoire marque la volonté des pouvoirs publics de progresser d’une simple gestion du personnel, à une véritable gestion tant individuelle que collective des ressources humaines en santé. Il permet d’enchérir une gestion statutaire stéréotypée du personnel, afin d’envisager une gestion plus ambitieuse des métiers et des compétences.

4. Le répertoire dresse une cartographie de 9 familles de métiers : « Gestion de l’information » ; « Ingénierie et maintenance technique » ; « Management, gestion et aide à la décision » ; « Qualité, hygiène, sécurité et environnement » ; « Recherche clinique » ; « Services logistiques » ; « Social, éducatif et culturel, sports et loisirs » ; « Soins » ; « Système d’information ». Ces neuf familles de métiers se subdivisent en sous-familles regroupant 200 métiers. Bien qu’il soit originairement conçu pour la fonction publique hospitalière, cet outil visant la notion globale de métier, pourra s’appliquer aux établissements et professionnels issus des secteurs sanitaire, social et médico-social, privé, à but lucratif ou non lucratif.

Recommandation 

Précisons d’ailleurs que suite à la recommandation « Vers des plans régionaux des métiers au service des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes », préconisant la création d’un répertoire national des métiers de la dépendance, la construction d’un répertoire des métiers du médico-social est très largement envisagée par les pouvoirs publics.

5. Outil de gestion des métiers et des compétences par excellence, le répertoire s’inscrit dans une démarche de gestion individuelle et collective des ressources humaines. D’une part, dans le cadre d’une gestion collective, il va permettre de quantifier les besoins en effectif et en formation par métier.

En tant qu’outil de communication interne et externe, il favorise l’élaboration des parcours professionnels des individus, et représente un excellant moyen de présenter le contenu et l’accessibilité des métiers. Somme toute, il constitue un outil indispensable à toute démarche prévisionnelle de gestion des ressources humaines, permettant d’identifier les métiers dits « sensibles » ou critiques d’un établissement.

Gestion individuelle des RH

D’autre part, dans le cadre d’une gestion individuelle des ressources humaines, le répertoire va permettre au professionnel de s’engager dans une démarche d’auto-évaluation par la réalisation de bilan de compétences. Ce dernier pourra également envisager une reconversion professionnelle, un parcours de mobilité ou une procédure de validation des acquis de l’expérience.

6. Le répertoire des métiers constitue donc un outil au service de la GPEC, s’inscrivant dans une perspective générale d’étude des nouveaux métiers. Dans le cadre de cette démarche métier, la réforme Licence, Master, Doctorat (LMD) , participe de la « réingénierie » des diplômes paramédicaux visant à faciliter la libre circulation des professionnels de santé dans l’Union Européenne, et à créer des passerelles entre formations et métiers.

L’intégration du diplôme d’état d’infirmier dans le processus LMD en 2009, a ainsi permis la reconnaissance de ce diplôme au grade de licence, ouvrant droit à l’inscription en niveau master. Cette réforme va ainsi permettre à un certain nombre de professionnels paramédicaux d’obtenir un diplôme « intermédiaire » de type master, et d’effectuer des actes relevant jusqu’à présent des seuls médecins. Si « l’universalisation de la formation en soins infirmier » représente une opportunité pour les professionnels, elle l’est également pour les patients en termes d’amélioration de la qualité des soins.

En effet, l’intégration du diplôme d’infirmier dans le schéma LMD va permettre d’accéder au master, mais aussi à la recherche de niveau doctorat. Cet accès à la recherche, favorisant une « compréhension élargie des situations de soins », représente « une réelle opportunité pour les usagers, car la qualité des soins en sera optimisée ».

7. Le rapport de mission HENART publié en janvier 2011 concoure également à « imposer la démarche métier ». En effet, bien que le champ sanitaire demeure régit par la règle de primauté du diplôme et de la formation initiale, le rapport propose de substituer au lien « diplôme  métier », l’équation suivante :
« besoins  activités  compétences  métier  formation  diplôme ».

La démarche métier devrait donc reposer sur les besoins en compétences. Outre le fait de « conforter et développer les métiers socles », c’est-à-dire les métiers existants, le rapport propose également de « cerner le champ des nouveaux métiers » et de « valoriser les parcours professionnels ».

8. Dans le même esprit, le rapport sur « la modernisation de la politique des ressources humaines dans les établissements publics de santé », rappelle l’importance de « valoriser les personnels au travers les chefs de pôles et les cadres, en s’appuyant sur l’évaluation ».

Somme toute, il rappelle la nécessité d’ « intégrer dans le projet d’établissement et donc dans le projet médical et dans le projet social, un volet ad hoc relatif à la gestion et à la modernisation des ressources humaines portant notamment sur le développement des compétences, de la mobilité et de la polyvalence ainsi que sur la reconnaissance de l’engagement collectif et individuel ».

A ce titre, le rapport clarifie le rôle du Directeur Adjoint en charge de la direction des ressources humaines, qui sur le plan stratégique, doit concevoir une politique de « GPMC », en lien avec les évolutions stratégiques du projet d’établissement et les indicateurs sociaux .

9. Enfin, l’ « étude prospective des métiers sensibles de la fonction publique hospitalière » rappelle la nécessité de systématiser l’utilisation du répertoire des métiers au cours d’une démarche « GPMC », afin d’améliorer la gestion des métiers de la fonction publique hospitalière mais aussi la gestion des ressources humaines au niveau des établissements eux-mêmes .

10. Le répertoire des métiers permet donc de dépasser la simple vision administrative de la gestion du personnel, et d’envisager une gestion des ressources humaines axée sur la démarche métier-compétence.

En effet, les diverses mutations auxquelles est confronté l’établissement, impose de repenser la gestion du personnel : T2A, nouvelle gouvernance, nouvelle organisation de l’offre de soin, évolutions démographiques, technologiques et logistiques, politique d’évaluation de la qualité et des risques, modification des attentes des usagers, ou encore réforme des formations initiales et continues. Ce « listing » témoigne de la nécessité de faire évoluer, voire de moderniser la gestion des ressources humaines en santé en privilégiant l’approche métier.

La démarche GPEC mise en œuvre par l’établissement de santé devra nécessairement intégrer cette évolution et l’apparition prochaine de nouveaux métiers de niveau intermédiaire. Ainsi que l’affirme Madame Valérie PECRESSE, reprenant la citation de NEWTON, « les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts ».

Dès lors, ne serait-il pas opportun d’envisager que certaines infirmières deviennent des « praticiennes » renouvelant des ordonnances ou prescrivant des examens, à l’instar des « praticiennes » exerçant aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou en Australie ? Dans le même esprit, il serait possible d’envisager que des manipulateurs radio soient formés à l’échographie cardiaque, que les détartrages soient effectués par des « hygiénistes-dentaire », ou que des anesthésies locales soient réalisées par des pédicures .

11. Au regard de ces éléments, le terme « GPMC », « Gestion Prévisionnelle des Métiers et des Compétences », utilisé dans le Rapport sur « la modernisation de la politique des ressources humaines», ainsi que dans « l’Etude prospective des métiers sensibles de la fonction publique hospitalière », prend tout son sens. En effet, dans le cadre de cette démarche métier, le champ sanitaire semble privilégier le terme plus global de « métier », à celui d’ « emploi » usuellement utilisé au sein de l’acronyme GPEC. Rappelons-le, le métier est un ensemble d’activités professionnelles, regroupant des postes, des spécialités, ou des emplois.

Il englobe donc la notion d’emploi. A titre d’exemple, le métier d’infirmière comprend les emplois-types d’infirmière en soins généraux, ou de bloc opératoire. Ceci explique certainement le fait que le champ sanitaire ait fait le choix depuis quelques années, de prioriser la notion de métier, au détriment de la notion d’emploi.

12. La démarche « GPMC » ou plus communément GPEC, devra donc prioriser l’analyse prospective des métiers, et permettre la description de l’emploi-type et la rédaction des fiches de fonction. Ces deux éléments constituent des outils de management indispensables à toute démarche GPEC. Initialement proposé par le CEREQ , le concept d’emploi-type est aujourd’hui repris par le pôle emploi dans le Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois (ROME). Il « décrit un ensemble de poste ou de situations de travail identiques ou assez proches pour permettre des activités comparables et nécessiter la mise en œuvre de compétences semblables ».

Il relève donc d’une démarche purement « descriptive » et non prospective, Il S’agit d’un simple « état des lieux » non lié au projet stratégique de l’établissement. La fiche-fonction, quant à elle, « correspond à une description des activités communes à un ensemble de postes existants dans l’organisme ». La fiche-fonction relève donc d’une démarche « prescriptive » au service du projet institutionnel. L’identification et l’élaboration de ces deux outils constitue un travail préalable et nécessaire à l’analyse des compétences. Afin de mener à bien une analyse prospective des métiers, l’établissement devra donc articuler au mieux l’utilisation du répertoire des métiers, avec la description des emplois-types et la rédaction des fiches fonction.

13. Cette étape préalable centrée autour de la notion de métier et déclinée en termes d’emploi-type et de fiche fonction, permettra à l’établissement d’analyser les compétences de ses professionnels.