Différence modification du contrat et modification des conditions

Dans un premier temps, le Cour de cassation distinguait la modification substantielle du contrat de travail, c’est-à-dire la modification importante,  qui nécessitait l’accord de volonté du salarié, de la modification non substantielle c’est-à-dire peu importante, qui pouvait être imposée par l’employeur en vertu de son pouvoir de direction. Cette position jurisprudentielle se heurtait à la théorie civiliste de la modification, qui veut qu’une modification même peu importante reste une modification du contrat, et nécessite de ce fait un accord de volonté.

Pour cette raison, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence le 10 juillet 1996[1], en faisant référence aux conditions de travail du salarié. Dorénavant, lorsque la modification touche le contrat, l’accord du salarié est requis. En revanche, lorsqu’elle touche les conditions de travail, elle relève du pouvoir de direction de l’employeur et s’impose aux salariés.

Les éléments essentiels du contrat

Parmi les éléments essentiels du contrat appelés « socle contractuel » on distingue la rémunération, le lieu de travail, le temps de travail, et la qualification.

Concernant la rémunération, la Cour de cassation affirme dans un arrêt « Di Giovanni » du 10 mai 1998, que « le rémunération contractuelle du salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié, même de manière minime, sans son accord ».

Le lieu de travail quant à lui, s’entend comme le secteur géographique[2] dans lequel se trouve l’établissement. Ainsi, le déplacement imposé au salarié au sein du secteur géographique constitue une simple modification du contrat de travail. En revanche, si le déplacement est imposé en dehors de ce secteur, il s’agit d’une modification du contrat de travail.

Le temps de travail constitue également un élément essentiel du contrat qui ne peut être modifié sans l’accord du salarié. En revanche, les horaires de travail ne font pas partis de ces éléments essentiels, et peuvent être imposés au salarié, sous réserve de ne pas modifier l’économie du contrat. Ainsi, le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit[3] bouleverse l’économie du contrat, et constitue une modification du contrat de travail.

Enfin, la modification de la qualification du salarié constitue une modification du contrat de travail, qu’il convient de distinguer de la simple modification des tâches, qui elle ne constitue qu’un changement des conditions de travail.

Après avoir déterminé la qualification de la modification du contrat de travail, il convient de nous intéresser  aux conséquences de l’éventuel refus du salarié (II).

Les conséquences du refus de modification du salarié

La proposition de modification pour motif personnel suscite une acceptation expresse de la part du salarié. En effet, en l’absence de réponse, on ne pourra en déduire que le silence du salarié vaut acceptation de la modification[4].

Lorsque le salarié refuse la modification du contrat, l’employeur en tire les conséquences. Soit il renonce à la modification proposée, soit il licencie le salarié.

Le salarié a également la possibilité de prendre acte de la rupture de son contrat qui s’analyse en un licenciement.

Dans tous les cas, afin d’apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement, le juge recherchera les motifs de la proposition de modification du contrat.

Lorsque le salarié refuse une simple modification de ses conditions de travail, ce refus constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, qui ne s’analyse pas nécessairement en une faute grave[5].

La modification du contrat de travail peut donc entraîner la rupture de la relation contractuelle. La modification de la situation juridique de l’employeur, nécessite également que nous nous intéressions à aux sorts  des contrats de travail en cas de changement d’employeur.

[1]Cass. Soc., 10 juillet 1996.

[2] La notion de secteur géographique a été affirmée par un arrêt en date du 4 mai 1999. Cass. Soc. 4 mai 1999.

[3]Cass. Soc. 5 juin 2001.

[4] Précisons qu’en cas de modification pour motif économique, c’est-à-dire pour un motif extérieur au salarié, le silence du salarié à l’issue du délai de 1 mois, vaut acceptation de la modification.

[5]Cass. Soc. 23 fév. 2005. 

Avocat droit du travail, licenciement, contrat de travail, Prud’hommes, Harcèlement

Maître MOUILLAC-DELAGE est Titulaire d’un Diplôme d’études Supérieures Spécialisées (DESS) en Droit des Relations de Travail et Social.

Différence modification du contrat et modification des conditions.

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