Les conditions de régularité de la négociation

1. Les conditions de déroulement de la négociation ainsi que l’accord conclu pourront éventuellement faire l’objet d’un contrôle par le juge judiciaire, juge de la négociation et de l’accord collectif, en cas de contestation de l’une des parties. Les conditions légales de régularité de la négociation qui conditionneront la validité de l’accord, feront donc l’objet d’une étude particulière. Par ailleurs, il conviendra de s’intéresser aux modalités juridiques spécifiques de financement d’un accord GPEC dans le champ sanitaire et médico-social.

I- Les conditions légales de la négociation

2. Ainsi que l’affirme Madame Marie-Laure MORIN, conseiller à la chambre sociale de la Cour de cassation, la négociation collective résulte d’un dualisme nécessitant que soit respecter les conditions de validité et de loyauté dans la formation des accords collectifs . Ainsi, nous envisagerons les conditions légales de négociation d’un accord GPEC, au travers le respect du principe de loyauté de la négociation (A), et de légalité de l’accord (B).

A- La loyauté de la négociation

3. Dans le cadre de son obligation triennale de négocier, l’établissement de santé devra veiller au respect du principe de loyauté dans le comportement des parties, ceci afin d’éviter tout risque de déséquilibres et d’échanges inégaux au cours du processus de négociation. Le concept de loyauté est issu du concept civiliste de bonne foi des parties, « bonafides », visé à l’article 1134 du Code civil, qui précise que « les conventions (…) doivent être exécutées de bonne foi ». Pour autant, il semble que la notion de loyauté soit préférée dans le langage travailliste, à la notion de bonne foi, pour des raisons textuelles certainement, mais aussi culturelles.

En effet, mentionnée à l’article L.2262-4 du Code du travail , l’usage de la notion de loyauté permet d’ « éviter une filiation trop directe avec le droit des obligations ». Si la notion de loyauté s’est progressivement imposée en matière d’exécution du contrat de travail, « l’exigence de loyauté (…) est de première importance au stade de la négociation des accords », car « au fur et à mesure que se développent processus et habitus négociatoires, l’idée d’un minimum de loyauté et de transparence ne peut que prendre de plus en plus la force de l’exigence ».

Précisons que la loyauté des parties à la négociation collective signifie avoir un « comportement avec un versant positif et actif », tel que « la volonté d’aboutir », et « un versant passif », supposant l’ « abstention d’actes négatifs à l’encontre du partenaire ». L’obligation de loyauté à l’égard de l’employeur, vise donc à contraindre ce dernier à négocier loyalement, mais rien ne l’oblige à conclure. Le respect de ce principe doit être apprécié au regard du comportement de l’employeur, qui doit notamment inviter toutes les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise à négocier la GPEC.

De même, outre son obligation de consulter les instances représentatives du personnel, ce dernier doit fournir aux représentants syndicaux, « toutes informations nécessaires, pertinentes, et appropriées pour leur permettre de négocier ». « Un devoir général de favoriser la conclusion de l’accord » pèse de ce fait sur l’employeur. Les parties à la négociation doivent donc faire preuve d’un « comportement dynamique d’échanges et non d’une attitude passive d’attente ». Négocier loyalement implique nécessairement une volonté minimale d’aboutir et une transparence des parties. Précisons également que le respect du principe de loyauté au cours des négociations peut se traduire par une limitation des prérogatives de l’employeur et notamment par une suspension de son pouvoir unilatéral.

En effet, conformément à l’article L.2242-3 du Code du travail, « tant que la négociation est en cours (…) l’employeur ne peut, dans les matières traitées, arrêter de décisions unilatérales concernant la collectivité des salariés, sauf si l’urgence le justifie ». Cette mesure marque « la volonté affirmée du législateur de privilégier désormais le négocié, au dépens de l’unilatéral ».

B- La légalité de l’accord

4. En droit du travail, l’accord collectif constitue un acte contractuel de droit privé qui s’impose au contrat de travail. Dès lors, il dispose d’un effet normatif, un effet erga omes , dont le corollaire est la nécessaire représentativité des organisations syndicales signataires . En effet, comme nous l’avons précédemment souligné, la représentativité syndicale constitue la qualité nécessaire pour représenter les intérêts d’une collectivité de travail.

La qualité de syndicat représentatif est donc l’une des conditions majeures permettant au syndicat de déterminer des mesures erga omnes, dans le cadre d’un accord GPEC. Par ailleurs, au nom du principe de participation, de liberté et d’égalité syndicale , l’invitation et la participation de toutes les organisations syndicales représentatives à la négociation constitue la deuxième condition de validité de l’accord GPEC que l’employeur se devra de considérer.

Enfin, pour que l’accord négocié entre les parties acquière force obligatoire, il convient que ce dernier bénéficie d’une majorité d’engagement, ou qu’il n’ait pas fait l’objet d’une opposition majoritaire. Ainsi, selon l’article L.2232-12 du code du travail, en présence de délégués syndicaux, l’accord GPEC doit avoir été signé par un syndicat représentatif totalisant au moins 30% des suffrages au premier tour des dernières élections professionnelles.

La validité de l’accord est également subordonnée à l’absence d’opposition d’une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50% des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles. Précisons que l’opposition doit être signifiée par écrit et de manière motivée, dans les huit jours suivant la notification de l’accord .

En l’absence d’opposition, l’accord est ainsi validé. En revanche, celui-ci est réputé non écrit si l’opposition est valablement exprimée . Enfin, l’issue de la négociation pourra soit conduire à la signature d’un accord GPEC, écrit et rédigé en français , à défaut de nullité. Soit à un échec des négociations, éventuellement signifié par un procès-verbal de désaccord, attestant de la tenue effective de la négociation et de sa date d’achèvement.

5. La mise en œuvre d’un dispositif GPEC nécessite pour l’établissement de se conformer, non seulement aux conditions légales de négociation, mais aussi aux conditions financières d’élaboration de la démarche, propres aux établissements de santé (II).

GPEC conditions de régularité de la négociation